lundi 4 juin 2012

Les aurores montréales - de Monique Proulx

Monique Proulx, Les aurores montréales, Montréal : Boréal, 1996, Coll. Boréal compact85, 239 p.

Quatrième de couverture
Ce sont des nouvelles, textes courts et incisifs, tous soigneusement taillés dans l’insupportable bana­lité des drames et des lieux. Le livre se compare à une petite mosaïque de pierres multicolores. Chacune conserve sa couleur rare et la forme unique de sa froide minéralité. L’ensemble n’en constitue pas moins un vivant portrait de Montréal, une effrayan­te collection de spécimens humains, un tableau prodigieux de cacophonie et de tristesse nordique [...].

Il faut lire sans hésiter
Les Aurores montréales. Pour apprivoiser l’atrocité. Pour attiser la fureur. Pour savourer le bonheur d’une écriture souveraine aux portes de la barbarie. Enfin parce que ces nou­velles s’ajustent de manière à former un livre, ce qui n’est pas toujours évident quand on rassemble des ­histoires dont chacune soutient si facilement sa propre unité.
Réjean Beaudoin, Liberté



Écrit de mémoire
Avec ce billet, je devrais commencer à rattraper mon énorme retard dans mes chroniques. Yeah! Toutefois, je suis confrontée à un énorme désavantage. En effet, cette lecture remonte à plus de cinq mois! Donc, cet avis est écrit de mémoire, ce qui m'empêche d'approfondir le billet comme je le voudrais. Veuillez m'en pardonner d'avance.

Une ville cosmopolite
J'adore la plume de Monique Proulx. J'ai déjà chroniqué deux de ses romans par le passé (Le sexe des étoiles et Homme invisible à la fenêtre). Mais ce coup-ci, c'est d'un recueil de nouvelles dont je parlerai. Un recueil qui, hélas, n'est pas arrivé à satisfaire mes attentes peut-être trop élevées.
Disons que j'ai trouvé le recueil écrit selon deux pôles très précis : le très bon ou l'anecdotique. Il s'agit d'une chose que je remarque souvent dans les recueils de nouvelles québécois, sans que je puisse l'expliquer. Il y a ainsi d'excellentes histoires, comme Madame Bovary, le récit d'une petite bourgeoise de banlieue qui rêve de quitter le banal, mais qui se retrouve snober par un intellectuel qui ne voit en elle qu'un ersatz de Madame Bovary.
Ou encore Les aurores montréales, nouvelle qui donne son titre au livre, et qui raconte l'intransigeance d'un adolescent qui a maille à partir avec les anglophones et les immigrants.
Ou même Noir et blanc, une réflexion marquante dédiée à Dany Laferrière sur la place des noirs au Québec (somme toute assez positive selon Proulx).
Ou Français, Françaises, une nouvelle ironique sur un écrivain québécois qui rêve de Paris et d'un éditeur français qui rêve de Montréal!
J'ai aussi eu une surprise en lisant Les transports en commun, lorsque je me suis aperçue que je l'avais déjà lue à l'école secondaire! Une bonne histoire sur la télé-réalité et la notion d'héroïsme.

D'autres m'ont laissé mitigé, comme L'enfance de l'art, une nouvelle sur un camionneur qui se paie les services d'une prostituée de douze ans. Terrible et affreux! C'est peut-être, d'ailleurs, parce que cette nouvelle est trop dur à lire pour l'esprit qu'elle m'a laissée cette impression de déchirement.... Ce même déchirement ressenti en lisant Le passage, l'histoire d'une naïve adolescente qui couche pour obtenir son premier emploi. Trop difficile pour mon esprit sensible. ;)

Bien entendu, toutes ces nouvelles possèdent un point commun : Montréal. Une ville que je n'ai jamais aimée, ce qui biaise un peu mon point de vue, mais qui fascine Monique Proulx par son énergie et sa diversité culturelle, celles-ci devenant le centre même de tous les récits. Ajoutons à cela un brin de post-modernisme, et Les aurores montréales reflète à la perfection son époque, c'est-à-dire le milieu des années '90, là où le Québec est entré dans sa plus grande phase d'immobilisme et d'individualisme, une phase néo-libérale dont les Québécois ne sont toujours pas sortie (mais un vent nouveau souffle à l'horizon les amis!) Le recueil prend donc une dimension anthropologique, un peu à la manière des chansons de Jean Leloup! On le lit, et on comprend des choses sur cette époque où prime le matérialisme, le sexe sans amour, la désillusion référendaire, le multiculturel (chacun dans son coin et on ne se mélange pas) et la perte des repères pour cette société qui évolue au gré de la technologie, mais qui a perdu ses projets de société.

Malgré tout, le principal reproche que je peux formuler concernant ce livre, c'est que son auteure ne renouvelle pas la structure traditionnelle des nouvelles. Beaucoup suivent la ligne suivante : un début, une complication, de courtes péripéties et une fin surprenante (parfois moraliste, hélas!). Oh, quelques nouvelles sortent du lot, comme Léa et Paul, par exemple, qui transgresse la ligne temporelle droite, à la façon d'un souvenir. Mais le contenu est loin d'égalé l'originalité de la forme, en offrant une histoire indigeste d'un couple qui bat de l'aile à cause d'une histoire d'avortement et d'infidélités répétées. Moraliste, parfois, je vous dis.
Je suis donc déçue de cette œuvre dont j'attendais beaucoup, étant donné que Monique Proulx fait partie de mes romancières préférées. Dommage!
Le tout demeure toutefois intéressant à lire, une nouvelle à la fois. Ça coince juste lorsqu'on tente de lire le recueil en une fois....

3 commentaires:

Philisine Cave a dit…

Difficile dans un recueil de nouvelles de combler à chaque fois le lecteur. C'est pour cela que cet exercice littéraire reste un des plus ardus.

Daniel a dit…

Ce recueil est le seul ouvrage de Monique Proulx que j'aie lu, il y a quelques années. Tu dis que ses romans sont meilleurs? Je l'espère bien!

Je te rejoins, quelques nouvelles sont intéressantes, mais la plupart, non. Peut être parce qu'elles nous semblent banales, et qu'alors, seraient intéressantes pour quelqu'un d'une autre culture?

Il faut donner à ce recueil le mérite de bien décrire la ville e Montréal : on s'y croirait, on y ressent parfaitement l'air de Montréal, son esprit... Air que j'abhorre. Qui aime Montréal aimera davantage les Aurores Montréales?

Mascha a dit…

Philisine Cave : en effet, la nouvelle demeure un exercice plus difficile qu'il n'y parait. Mais cela n'enlève rien à ma déception. :(

Daniel : je te recommande vivement ses romans. Mon préféré est Le sexe des étoiles (lu en une nuit blanche), mais j'ai beaucoup aimé Homme invisible à la fenêtre aussi. ;)
Sinon, je pense comme toi : qui aime Montréal aimera peut-être plus ce roman. Mais le public devient restreint en dehors de cette ville... je ne connais personnellement aucune âme qui vive qui aime cette métropole >_<' !
Je crois donc ce que livre n'est pas à classer parmi ses meilleurs ouvrages. Heureusement, il y a le reste. ;)